A Place of Greater Safety
Hilary Mantel
Ed. Fourth Estate
Two officers hurry forward to help Fabre [d'Eglantine].
"We must take you below, Citizens, while the jury is out".
"Take your hands off me, please", Hérault says, with a dangerous politeness. "Come Danton: no point in standing here. Come, Camille -- I hope you'll not make a fuss".
Camille is going to make as much a fuss as he can. An officer of the court stands before him. The man knows -- it is an article of faith with him -- that the condemned don't fight back. "Please come with us", he says. "Please come quietly. No one wants to hurt you, but if you don't come quietly you're going to get hurt".
Danton and Lacroix begin to plead with Camille. He clings desperately to the bench. "I don't want to hurt you", the officer says abjectly. A section of the crowd has detached itself and come back to watch. Camille sneers at the officer. The man tries without success to pull him away. Reinforcements arrive. Fouquier's eyes rest unseeingly on his cousin. "For God's sake, overpower him, carry him out", Hermann shouts. He slams a book down in irritation. "Get them all out of here".
One of the officers puts his hand into Camille's long hair and jerks his head back violently. They hear the snap of bone and his gasp of pain. A moment later they have knocked him down to the floor. Lacroix turns his face away in distate.
[...] Just outside the courtroom, Fabre's strength almost gives way. "Stop", he gasps. The two officers assisting him put their hands under his elbows and lean him against the wall. He struggles for breath. Three men pass him, dragging Camille's limp body. His eyes are closed and his mouth is bleeding. Fabre sees him; his face crumples, and suddenly he begins to cry. "You bastards, you bastards", he says. "Oh, you bastards, you bastards, you bastards".
Bon bon bon. Je m'étais juré de ne pas en parler sur ce blog, mais je craque. Ce bouquin, je l'ai acheté en octobre, et je l'ai lu trois fois depuis. C'est terrible ; je ne sais pas pourquoi il me fait un tel effet. Enfin, j'avais 14 ans l'année du bicentenaire de la Révolution française, j'étais donc romanesque et impressionnable -- et je suis restée fascinée par le trio Danton/Robespierre/Desmoulins. Mais ce livre, c'est autre chose. Déjà, il me fait pleurer de la page 834 à la page 872 -- et les bouquins qui me font pleurer, c'est vraiment rare. Les amitiés qui tournent mal, voilà, ça m'arrache le cœur...
En tout cas, comme dans Wolf Hall, Hilary Mantel réussit à rendre ses personnages ultra-réels et très très très attachants (oui, ça fait un nouveau crush -- devinez qui ?) ; et là aussi, les dialogues sont un vrai bonheur. Je suis fascinée par cette aptitude à oublier le poids de l'Histoire, des interprétations et de la "mythification" dont on l'a chargée, pour redonner un souffle convaincant à des personnages réels. J'aime bien, également, que l'auteur ne s'embarrasse pas -- trop -- d'exactitude scientifique. Les faits importants sont là, bien sûr, mais ça ne vire pas à la leçon déguisée. L'important, ici, c'est la littérature, le drame, les personnages, pas l'Histoire.
D'après certains, Danton était un gros beauf corrompu, Camille Desmoulins un avocat pleutre et raté, Robespierre un tyran au cœur sec... D'après d'autres, ils étaient les héros de la Révolution, épris de liberté et oeuvrant pour le bien du peuple… Alors pourquoi pas une autre interprétation ? Il y a de la place. Comme le dit Hilary Mantel elle-même :
Rue Honoré: One day, a long time ago, his mother sat by a window, making lace. He saw that it was the gaps that were important, the spaces between the threads which made the pattern, and not the threads themselves.